Contrôles environnementaux : le stupéfiant rapport Massat [05/06/15]

24 février 2017
Contrôles environnementaux : le stupéfiant rapport Massat [05/06/15]

La rectification des ruisseaux pourrait bientôt ne plus être sanctionnée

 
La mission MASSAT du nom de la députée de l'Ariège nommée par le Premier Ministre, a rendu aujourd'hui son rapport très attendu sur les contrôles en agriculture. Un rapport très partial qui propose d'affaiblir les contrôles, notamment environnementaux, dans le domaine agricole alors que ceux si sont déjà peu nombreux. Ce n'est pas une surprise, vu la composition très orientée de la mission : la députée était appuyée par le président de la chambre d'agriculture d'Alsace et par la Directrice Départementale de l'Agriculture du Loiret ! Aucun représentant des corps de contrôle, aucun membre du ministère de la justice, pas plus que d'organisations de protection de l'environnement ! On se demande d'ailleurs pourquoi, ce ne sont pas les inspections générales de l'environnement et de l'agriculture qui ont été saisies de cette mission. Sans doute avait-on peur de leurs conclusions !

Les recommandations de la mission s'ouvrent d'ailleurs sur une demande particulièrement iconoclaste : « La mission recommande qu'aucun constat de non conformité ne soit dressé  pour des points de contrôle dont les règles n'auraient pas été portées à la connaissance des agriculteurs en temps utile ». Ah bon ?  Le citoyen lambda se voit appliquer le fameux « Nul n'est censé ignorer la loi » mais l'exploitant agricole, professionnel qui plus est, et qui dispose dans chaque département d'un établissement public appelé chambre d'agriculture pour l'informer, échapperait à ce principe ! Et comment les inspecteurs de l'environnement pourront savoir si la situation d'infraction qu'ils constatent a fait l'objet ou pas d'une information de l'auteur concerné ? 

Parmi les propositions de la mission, on relèvera la demande d'établir dans chaque département, un inventaire des cours d'eau. Charge lourde qui va mobiliser l'énergie des services, au moins pendant ce temps il n'y aura plus de contrôles… Et seuls les travaux sur cours d'eau inventoriés pourront être verbalisés, pour les autres, la mission recommande de ne délivrer que des avertissements !

D'ailleurs, probablement par ce que les sanctions sont trop nombreuses et trop sévères, la mission recommande que les organisations agricoles « recueille les cas où les barèmes de sanctions actuels paraissent excessifs » . Nul doute que pour la Coordination Rurale et la FNSEA, de tels cas seront nombreux !

La profession agricole serait d'ailleurs la seule concernée par les contrôles environnementaux, la mission lui réservant les réunions de concertation qui auront lieu avec les préfets dans chaque département. L'absence de tous les autres acteurs, au premier rang desquels les associations environnementales, permettra sans doute de renouveler l'exemple de la Vendée, département dans lequel le Préfet et la FDSEA ont cosigné une « charte » dans laquelle le Préfet s'engageait à informer la FDSEA des dates et lieux des campagnes de contrôles … !

Enfin, parfaite illustration de la vraie-fausse naïveté des auteurs du rapport, la mission recommande « de condamner unanimement et sans réserve les comportements de violence à l'égard des contrôleurs à la fois par les représentants de l'Etat, par les élus, et par l'ensemble des représentants agricoles » . Seul hic :  comment faire quand ce sont des responsables agricoles qui attisent la haine à l'égard des contrôleurs (voir propos du Président de la Chambre d'Agriculture du Lot et Garonne) ou sont eux-mêmes condamnés pour obstacle au contrôle par les tribunaux (cas du secrétaire général de la FDSEA du Maine et Loire).

Les constats et propositions de ce rapport apparaissent singulièrement décalés avec l'évaluation des polices de l'environnement menée l'an dernier par une mission interministérielle (voir actu semaine 09). Celle-ci indiquait « Il convient par conséquent de ne pas affaiblir la police de l'environnement, par une application (via l’instrument de la police) timide, voire timorée, parce que cherchant à ménager les contrevenants ou à minorer les effets de leurs protestations".  D'ailleurs, la récente la circulaire de la ministre de la Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, regrettait la « diminution régulière du nombre de condamnations pénales des infractions environnementales. » Rappelant les enjeux communautaire et la demande sociale, la Garde des Sceaux indiquait : « ce contexte doit à l'évidence conduire les autorités judiciaires à davantage de vigilance dans la répression des atteintes à l'environnement, tout particulièrement dans le champ des contentieux communautaires (pollution des eaux d'origine agricole, traitement des eaux résiduaires urbaines, protection des espaces naturels, délits …).

Trop occupée à entendre les organisations agricoles, la mission MASSAT n'a pas dû avoir le temps de lire ces documents !
 

 

 

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