Pesticides | Le prosulfocarbe en sursis
Le très volatil prosulfocarbe, désherbant de pré-levée sur céréales, vient d’être mis sur la sellette par l’Anses. L’Agence annonce ce jour, avec effet immédiat, des restrictions d’usage pour le pesticide ; les conditions d’usages actuelles entraînant une exposition dangereuse pour la santé des enfants.
Avec 6 500 T, le prosulfocarbe est la deuxième substance active herbicide la plus vendue en France, comme en Bretagne. Principalement utilisé pour le désherbage des céréales à l’automne, le prosulfocarbe est, en raison d'une forte dissémination dans l'air, responsable de contaminations croisées d’autres cultures (sarrasin et pommes notamment) entraînant parfois la destruction complète de celles-ci ; et une perte sèche pour les agriculteurs victimes.
L’Anses vient de faire le point sur les investigations menées concernant cette substance active. Si la contamination croisée ou la présence de ce pesticide dans l’air a été examinée, c’est sur le danger que présente l’exposition des riverains à celui-ci que l’Agence fonde sa décision rendue publique ce jour.
Une exposition des riverains dangereuse
En effet, dans les conditions de pulvérisations actuelles, l’exposition des enfants correspondait, pour certains usages, à plus de 5 fois la valeur toxicologique de référence (quantité maximale de substance active à laquelle une personne peut-être exposée quotidiennement, sans effets dangereux pour sa santé).
Comment ne pas être horrifiés par ces chiffres ! Le prosulfocarbe est autorisé et utilisé depuis plus de 30 ans, exposant les populations les plus vulnérables depuis lors !
Des restrictions d'usage immédiates
L’Anses réduit donc immédiatement les doses homologués pour les différents produits contenant du prosulfocarbe (-40%), instaure une zone non traitée (ZNT) de 10m en limite de parcelle, oblige l’utilisation de buse limitant la dérive de 90 % faute de quoi la ZNT doit être étendue à 20m.
Par ailleurs, le détenteur de l’autorisation de mise sur la marché (AMM), Syngenta, devra faire la preuve que ces mesures de sécurité sont efficaces d’ici au 30 juin 2024, sans quoi les AMM seront retirées sans délai de grâce. Une procédure suffisamment inédite pour être soulignée, même si choix du maintien du prosulfocarbe coûte que coûte se pose.
Toujours des trous dans la raquette
Si les travaux conduits par l’Anses ont le mérite d’exister, ils mettent une fois de plus en lumière l’insuffisance des procédures d’autorisations des pesticides. Le prosulfocarbe reste autorisé alors qu'il est impossible d'avoir la certitude de l'innocuité de ce pesticide et de s'assurer de l'efficacité de ces nouvelles restrictions d'usage.
Pour Eau & Rivières, le durcissement des conditions d’utilisation confirme la dangerosité de cette substance active. Il permet de surseoir à la nécessité d’une procédure de retrait pure et simple du prosulfocarbe. Compte-tenu de la volatilité de cette molécule, il ne doit pas être question de mieux l’utiliser mais bien d’en interdire son usage, comme l'ont déjà demandé la FNAB (Fédération nationale d'agriculture biologique) et Générations futures.