Débat sur le saumon de printemps

23 juin 2020
Débat sur le saumon de printemps

Pêcher ou ne pas pêcher le saumon en ce printemps 2020 ? Si la question divise les pêcheurs bretons, elle a le mérite de soulever les fragilités d’un système de protection, d’une espèce patrimoniale et la fragilité de nos rivières.

 

Malgré les différents programmes de conservation, notamment la Directive cadre sur l’eau de 2000, la situation est critique. Le saumon est classé espèce vulnérable par l'UICN et les populations ont décliné de 70% depuis les années 70 (extrait du discours du programme SAMARCH ).

 

L’enjeu est considérable, 50 % du stock national est en Bretagne

 

Les premières mesures réglementant la pêche du saumon datent du XIIIe siècle explique Pierre Martin, Docteur en histoire moderne, spécialisé dans l’histoire maritime et fluviale.

Plus récemment, c’est l’Ocsan (Organisation de conservation du saumon de l’Atlantique Nord) qui orchestre la conservation du saumon au niveau international. En Bretagne, c’est le Cogepomi (Comité de gestion des poissons migrateurs) qui s’en fait le relais. Il est composé de l’Etat, de collectivités territoriales, de pêcheurs et d’associations.

 

La Bretagne, avec la mise en place des TAC (total admissible de captures par rivière), avait commencé à mettre en place des premières bases de gestion au niveau de la pêche. Sur le terrain cependant, pour certaines rivières, le TAC était supérieur à la population de castillons (saumon d’été).

 

Aucune rivière bretonne ne peut atteindre la limite de conservation 3, la plus exigeante

 

A la demande de l'OCSAN ,une autre méthode de gestion est proposée.C'est le programme RENOSAUM qui fixe des limites de conservation pour chaque rivière. Le premier constat montre que sur un certain nombre de rivières, les populations sont fortement menacées, sinon en danger de disparaître. Trois limites de conservation étaient proposées, c'est la deuxième qui serait choisie  ...avec des statu quo possibles.....pour quelques rivières fragilisées. AUCUNE rivière bretonne ne peut atteindre la limite de conservation 3, la plus exigeante.

 

Pour mieux comprendre, revenons un peu sur notre poisson. Il grandit en rivière durant un ou deux ans. Il part en mer, vers le Groenland, les îles Féroe y parfaire sa croissance durant une à trois années avant de revenir se reproduire en rivière. Après la reproduction, la majeur partie des saumons meurt. Durant toute sa vie, l’aventurier va croiser : les pêcheurs en rivière, les pollutions, le manque de nourriture (de moins de moins à cause de l’effondrement des populations d’insectes / plancton), les bateaux usines, les cormorans, la pêche de loisirs en mer, une ou deux maladies qui traînent, les microplastiques et une quantité d’autres inconnues... Quand enfin, il réussit à revenir se reproduire, il doit passer les barrages, buses et autres remblais. Et pour pondre ses œufs, il lui faut une eau fraîche et oxygénée et une gravière propre ce qui sous entend que la rivière fonctionne bien.

 

La mauvaise qualité de nos rivières n’est pas la seule menace pour le saumon, mais à ce stade de vulnérabilité pour le saumon, elle n’en reste pas moins déterminante. Or la rivière reflète le bassin versant tout entier : la terre, la mer, tout est lié et les responsabilités … diluées.

 

Pour préserver notre passion, nous devons réguler maintenant !

 

Lorsque la pêche fut réouverte après le confinement, il restait deux semaines avant la fermeture. Youenn Landrein, ancien président de la Fédération du Finistère pour le pêche et la protection des milieux aquatiques et ancien président d'Eau & Rivières- a donc émis l’idée de ne pas pêcher le saumon de printemps - qui est le meilleur reproducteur- cette année afin d’épargner une menace au poisson.

 

« Les pêcheurs sont des sentinelles, s’ils ne viennent plus au bord des rivières, qui veillera sur elles ? » disent les uns, « Les menaces sont trop nombreuses, si nous voulons continuer à pêcher le saumon, notre passion à tous, nous devons nous réguler maintenant ! » rétorquent les autres. « Les scientifiques disent que l’impact des pêcheurs est négligeable par rapport à toutes les autres menaces », répondent certains.

 

Le débat est vif

 

Les arguments s’enchaînent et divisent. Malgré tout, les pêcheurs sont tous d’accord sur une chose : ce poisson c’est leur passion et ils ne veulent pas arrêter de pêcher que ce soit maintenant ou plus tard, cette différence de stratégie interroge t elle le profil du pêcheur ? C’est une autre histoire ! Si ce sujet vous passionne, n’hésitez pas à aller visiter le site de Bretagne Grands Migrateurs. Vous y trouverez beaucoup d’informations.

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