Qualité de l’eau en Finistère | Tout ne va pas bien M. le Préfet

19 décembre 2022
Qualité de l’eau en Finistère | Tout ne va pas bien M. le Préfet

Le préfet du Finistère organisait vendredi passé une conférence de presse pour se féliciter de l’amélioration de la qualité de l’eau dans le département. Pour les eux de baignade, il n’y a de quoi se satisfaire qu’en omettant des informations essentielles, que mettent au jour nos trois associations.

 

Félicitons-nous. En Finistère, le taux de conformité des eaux de baignade pour la saison 2022 est de 98 %, un pourcentage stable depuis quatre ans. Les contrôles n’ont jamais été aussi importants, les mesures prises sont les bonnes. Oui mais le Léon est toujours le mauvais élève.


 

Des contrôles aléatoires qui manquent deux pollutions sur trois

Le « contrôle sanitaire » réalisé par l’ARS répond aux seules obligations réglementaires européennes : il s’agit de réaliser au hasard un certain nombre de prélèvements d’eau sur les sites de baignade, et de les analyser.

Destinée uniquement à calculer un classement, cette surveillance ne peut détecter qu’une faible part des pollutions. Ainsi, en Iroise, on sait que les pollutions se produisent essentiellement quand il pleut, et qu’elles durent environ deux jours. Sur les plages historiquement les plus exposées aux pollutions, l’ARS réalise au maximum 13 prélèvements entre le 15 juin et le 15 septembre, et couvre ainsi au maximum 26 jours sur 90, donc moins d’un jour sur trois :

 

"Statistiquement, le fameux « contrôle sanitaire » manquera donc deux pollutions sur trois"

 

"Statistiquement, le fameux « contrôle sanitaire » manquera donc deux pollutions sur trois"Même s’il n’a jamais été aussi important, ce contrôle est bien incapable d’assurer la sécurité sanitaire : ce n’est d’ailleurs pas son rôle », explique Christophe Le Visage, d’Eau & Rivières de Bretagne.

 

Et de mauvais résultats éliminés...

Eau et Rivières de Bretagne a par ailleurs détecté que l’ARS éliminait du classement une grande partie des pollutions par temps de pluie, ce qui prive le classement de toute signification réelle, et explique d’ailleurs des améliorations de classement présentées par la préfecture comme des améliorations de qualité.

Malgré une saison relativement favorable au plan météorologique (sécheresse, ce qui a limité le lessivage des sols) et même avec ces classements améliorés artificiellement, les plages d’Iroise restent parmi les mauvais élèves : bien qu’elle soit très lacunaire, la surveillance de l’ARS a ainsi détecté en 2022 19 pollutions importantes sur 13 plages d’Iroise (Tréompan, Kerdéniel, Gwisselier, Penfoul, Verlen, Melon, Pors and eis vinis, Illien, Blancs Sablons, Berheaume,Trez Hir, Portez, Trégana)… A ce jour, aucune explication sérieuse n’a été trouvée à la plupart de ces pollutions.

 

En Iroise et en 2022, sur 38 plages, 13 seulement (soit à peine un tiers) n’ont connu aucun épisode de pollution (prélèvement « moyen » ou « mauvais »).

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Figure 1 2022 : plages d'Iroise avec au moins un prélèvement "mauvais"

En Iroise en 2022, 18,7% des prélèvements réalisés par l’ARS étaient « moyens » ou « mauvais », avec des points noirs classiques (Tréompan : plus de 50% ; Illien : 67%).

 

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Désinformation : le graphique malhonnête du préfet

Dans le dossier de presse du préfet, Le graphique qui illustre les sources de pollution dans la note de la préfecture est malhonnête.

Il suffit de le comparer avec le même graphique, mais publié par l’Ifremer, organisme scientifique reconnu, pour découvrir qu’on y a oublié l’essentiel…

 

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Figure 1 - La note de la préfecture

 

 

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Figure 2 - Figure IFREMER

 

 

"L’épandage agricole est le grand absent du graphique de la préfecture, mais à la place ils ont ajouté les goélands !"

 

« L’épandage agricole est le grand absent du graphique de la préfecture, mais à la place ils ont ajouté les goélands ! Alors que l’épandage est de très loin la principale source de bactéries sur les bassins versants des plages d’Iroise, et que cette source apparaît dans tous les « profils de baignade » réglementaires », explique Laurent Le Berre, président de l’APPCL et administrateur d’Eau & Rivières de Bretagne.

 

Pour les communes du pays d’Iroise, on est à plus de 4000 porcs par km² de surface agricole ! De plus, un porc produit 30 fois plus de bactéries E.Coli qu’un homme (source Ifremer).

Les centaines de milliers d’animaux enfermés dans les élevages intensifs hors-sol produisent en effet l’essentiel des matières fécales et des bactéries dans le pays d’Iroise : pourtant, ils ont disparu du graphique ! De qui se moque-t-on ?

 

Perspectives d’amélioration?

A part des actions de communication parfois ridicules (les goélands, principale source de pollution) et la mise en avant constante des améliorations de classement dues pour l’essentiel aux manipulations de l’ARS, les efforts des collectivités en Iroise sont pour le moment peu visibles : contrôles toujours insuffisants des installations d’assainissement non collectif, investissements pendant longtemps limités dans l’entretien des réseaux d’assainissement collectif.

 

Les redevances que paient les consommateurs d’eau servent à financer des actions médiatisées mais très symboliques : systèmes d’abreuvement, « pompes à museau » ; les bovins qui pâturent en liberté ne peuvent être à l’origine des pollutions généralisées de nos plages...

 

L’étude par Eau et Rivières de Bretagne de l’état bactériologique des cours d’eau d’Iroise (tous très pollués) a montré que les pollutions des eaux de baignade en Iroise sont très vraisemblablement d’origine agricole : les collectivités n’ont pas de compétences dans ce domaine, c’est à l’État d’intervenir.

 

« Nous attendons donc avec impatience des mesures pour réduire la pollution liée aux épandages : pour le moment, l’action de l’État se limite à autoriser toujours plus d’animaux (exemple : régularisation récente de l’élevage Avel vor à Landunvez, situé en amont de plages polluées chroniquement, après celui de Kerascot à Plouarzel …) sans la moindre contrainte concernant les pollutions bactériologiques », disent nos trois associations.

 

Aller plus loin

Dossier de presse du préfet

 

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