Le défi de la transition de l'économie agricole bretonne [01/02/16]
Les crises récurrentes qui secouent le monde agricole révèlent un modèle à bout de souffle auquel les trois plans successifs mis en œuvre depuis 2010 en Bretagne entre l'Etat, la Région, et les organisations agricoles, n'ont rien changé ! Si la détresse de nombreux producteurs est réelle, elle ne doit pas conduire à des actes de vandalisme dont le coût élevé sera une fois de plus supporté par les contribuables.
Pour ne pas se tromper de remèdes, il faut avoir le courage de regarder en face les origines des crises actuelles : dérégulation du marché européen (notamment avec la fin des quotas), concentration et spécialisation des exploitations générant une capitalisation excessive, filières basées sur l'exportation et confrontées au dumping social, perte d'autonomie (notamment protéique) et faible valeur ajoutée de nos filières agricoles et agro-alimentaires. Tout un système qui a été porté par les responsables de la FRSEA, et leurs alliés des banques, des assurances, des coopératives, des fournisseurs, qui - eux - ne semblent pas touchés par la crise !
Oui, les prix sont trop bas pour permettre de rémunérer normalement les producteurs ! Mais non, l'injection récurrente de crédits nationaux ou régionaux ne résout rien du mal profond qui ronge l'agriculture depuis trop longtemps ! Les solutions du passé, comme l'augmentation des volumes pour compenser la baisse des prix, ne marchent plus et conduisent les producteurs à la faillite.
Et on le voit, le détricotage des normes environnementales demandé et obtenu n'a rien résolu, contrairement à ce qu'on pouvait encore entendre il y a quelques mois ! Si les responsables des chambres d'agriculture bretonnes et de la FRSEA avaient mis autant d'énergie à anticiper la fin des quotas laitiers ou la saturation du marché porcin qu'à faire pression pour obtenir les reculs de la réglementation environnementale, nous n'en serions pas là aujourd'hui !
Des solutions durables existent pourtant, toutes les exploitations ne sont pas en crise et les exemples ne manquent pas : en agriculture biologique, mais aussi en agriculture durable liée aux territoires : système herbagers, circuits courts, labels.... Avec à la clé des créations d'emplois !
Dans la guerre des prix qui voit s'affronter les différents bassins de production porcine ou laitière de l'Europe, la Bretagne ne manque pas d'atouts.
Encore faut-il que l'Etat, le Conseil Régional, les organisations agricoles et agro-alimentaires, plutôt que d'accepter l'hémorragie de centaines d'exploitations, s'engagent enfin à organiser et soutenir la transition à opérer pour une économie agricole et agro-alimentaire durable et pour des agriculteurs et agricultrices vivant dignement de leur métier.
Eau & Rivières de Bretagne appelle solennellement le président du Conseil Régional Jean-Yves LE DRIAN à relever ce défi.