Métabolites de pesticides | Des petits nouveaux dans l’eau ?

06 avril 2023
Métabolites de pesticides | Des petits nouveaux dans l’eau ?

L’Anses vient de publier le rapport présentant les résultats de sa campagne nationale de mesure des polluants émergents dans l’eau destinée à la consommation humaine. Elle y traque la présence de composés chimiques qui ne sont pas ou peu recherchés lors des contrôles réguliers. Si le rapport s’intéresse à plusieurs composés, dont des résidus d’explosifs ou un solvant, nous ne nous intéresserons ici qu’aux résultats concernant les pesticides et leurs métabolites.

 

Pour cette campagne, l’Agence a réparti équitablement sur le territoire 300 sites d’échantillonnage, chaque département étant couvert par 3 prélèvements. « Les échantillons prélevés sont représentatifs de l’alimentation d’environ 20 % de la population » précise l’Anses. À chaque fois, des analyses ont été réalisées et sur l’eau brute et sur l’eau traitée. Sans grande surprise, le rapport confirme la contamination de la ressource en eau brute comme traitée par les pesticides et encore plus par leurs métabolites. 

 

Qui cherche, trouve


Rien d’étonnant, en élargissant la focale et grâce à l’amélioration de techniques de laboratoires, l’Anses vérifie la présence de plusieurs composés qui n’étaient pas détectés jusqu’alors. Sur les 157 pesticides et métabolites de pesticides recherchés, 89 ont été détectés au moins une fois dans les eaux brutes et 77 dans les eaux traitées. C’est ainsi que l’Agence met en lumière la présence d’un métabolite du chlorothalonil, le chlorothalonil R471811, dans plus de la moitié des échantillons (fréquence de quantification de 60 % en eau brute et de 57 % en eau traitée). Pire, il dépasse même la limite de 0,1 µg/L dans plus d’un tiers des échantillons ; limite au delà laquelle l'eau potable devient non-conforme. À noter que deux autres métabolites du chlorothalonil sont aussi responsables de situation de dépassements.


D’une manière générale, la totalité des eaux brutes et eaux traitées prélevées en Bretagne contient au moins un pesticide ou métabolite. La fréquence de non conformités en eaux traitées est aussi la plus élevée au niveau national en Bretagne : 92%, contre 76% en Hauts de France, deuxième région la plus touchée.

 

Interdits mais toujours présents


Le chlorothalonil est un fongicide interdit en Europe depuis 2020 du fait de son classement comme cancérigène probable. Le métabolite R471811 est considéré comme pertinent pour l’eau destinée à la consommation humaine. 
Ce métabolite n’avait encore jamais été intégré dans le contrôle sanitaire de l’eau destinée à la consommation humaine par les Agence régionales de santé (ARS). Sa présence fait plus que questionner.
D’autant plus qu’il risque d’être présent pour longtemps. À l'exemple de l'atrazine, interdite depuis plus de 20 ans et dont les métabolites contaminent toujours l'eau.

 

Des métabolites dont on ne sait se défaire


Si jusqu’à présent les filières de traitement par charbon actif ou leur renforcement, ont permis aux producteurs d’eau potable de se défaire d’une grande partie des métabolites, le cas du chlorothalonil est particulier. En effet, ses métabolites ne sont que très mal retenus par les charbons actifs ou ces derniers montrent rapidement leurs limites demandant à être renouvelés plus fréquemment. Seuls les procédés de nanofiltration ou d'osmose inverse semblent être efficaces mais à quel coût ! Outre qu'ils soient gourmands en eau et en énergie, l’eau filtrée doit être reminéralisée avant distribution,sans compter que les résidus de traitement, le concentrat, doivent être retraités.
La technique montre certaines limites. 

 

Et la santé dans tout ça ?


Encore une fois, l’analyse faite n’interroge les composés qu’un par un, les uns à côté des autres. Or la contamination de l’eau potable par plusieurs pesticides ou métabolites est renseignée : dans seulement 23 % des échantillons d’eau traitée, il n’est retrouvé aucun pesticide ou métabolite ; quand dans 10 % d’entre eux, plus de 10 en sont retrouvés (maximum 28). Quid des effets cocktails ?
Sans parler des dépassements multiples ; en effet, si la plupart des non-conformités sont dues à un seul composé, 23 % d’entre elles ont pour responsables plusieurs composés (jusqu’à 10).

 

Pas d’eau potable de qualité sans eau brute de qualité


Nous l’avions annoncé l’épisode de l’ESA-Métolachlore allait se reproduire (voir nos actualités à ce sujet).

Qui peut encore croire qu’en autorisant l’utilisation des pesticides, ceux-ci ou leurs métabolites resterons bien sagement dans les parcelles traitées ? Qu’importent les mesures de gestion, quand elles existent, utiliser des pesticides revient à contaminer l’environnement, et qui plus est, un bien commun et vital : notre eau. 


Pas besoin de tout connaître pour agir, le tableau dressé est suffisamment éloquent. Il est urgent que l’État ait le courage de mesure sans regrets : les pesticides de synthèse n’ont pas leur place dans les aires d’alimentations de captages. Les pesticides de synthèse n'ont pas leur place, tout court.

 

Notre plaidoyer pour une eau sans pesticides

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