Nitrates et algues vertes, dialogue et fermeté
Dialogue avec les pouvoirs publics et la profession agricole
Ce n’est pas l’agriculture que nous mettons en cause, mais une certaine agriculture bretonne, détachée du sol, qui surestime très largement la capacité des cultures à mobiliser tout l’azote qui leur est apporté (sous forme d’effluents animaux, d’engrais chimiques, de digestats de méthaniseurs, etc.). Aussi avons-nous accepté d’évaluer une à une les dispositions actuelles du Programme d’Actions Régional (PAR) "nitrates", pour en identifier les plus pertinentes, pour y cerner les obligations de pure forme accumulées au fil des ans (au profit d’organismes tiers qui remplissent pour l’agriculteur les bilans demandés, fondés sur des rendements jamais atteints) et pour en proposer de nouvelles, plus efficaces.
L’hypothèse d’aboutir au respect, non plus d’objectifs de moyens, mais bien d’objectifs de résultats, assortis de limitations en terme d’apports azoté sur les terres, est une piste qui est enfin étudiée, après avoir longtemps été repoussée.
Fermeté en poursuivant l’État et en le mettant sous pression
Nous venons de déposer notre recours contentieux contre le dernier arrêté Nitrates, le PAR 7 de mai 2024, et nous avons saisi le juge de l’exécution pour souligner que le jugement du 18 juillet 2023 enjoignant à l’État de « prendre toute mesure supplémentaire d’application immédiate » n’avait toujours pas été satisfait.
Toujours sur le même sujet, le juge s’apprête à clore l’instruction de notre contentieux « toutes mesures utiles » introduit en octobre 2022, qui vise à contester les carences répétées de l’État dans la lutte contre les perturbations du cycle de l’azote, l’une des 6 limites planétaires déjà dépassées. Cette action contentieuse faisait suite aux conclusions de la Cour des Comptes et de la mission sénatoriale de 2021, et à plusieurs autres rapports de carence. Après de nombreux échanges contradictoires avec l’État, nous espérons connaître le jugement de cette affaire au premier ou second trimestre 2025.
En ce qui concerne notre demande de condamner l’État à réparer le préjudice écologique, lancée simultanément en octobre 2022, nous arrivons aussi au bout du processus des débats contradictoires. La matière est complexe et pose des questions de droit qui ne manqueront pas, soit de montrer que la rédaction sur ce point de la loi du 8 août 2016 est inadaptée en matière de préjudice écologique porté aux cours d’eau et espaces marins, soit de dessiner une jurisprudence nationale, qui ne manquera pas d’être discutée.
Ces actions portent leurs fruits "à petits pas", car elles nécessitent l’exploration de voies nouvelles. Mais nous sommes déterminés à aller aussi loin que possible pour faire régresser les nitrates en Bretagne, voire faire disparaître à terme les marées vertes, et toutes les autres perturbations des milieux aquatiques, moins visibles et peut-être tout aussi préoccupantes.