Plan eau : passons aux actes 

31 mars 2023
Plan eau : passons aux actes 

Le plan Eau présenté par le gouvernement ce jeudi 30 mars contient des annonces qui étaient attendues depuis longtemps. Mais seront-elles suffisantes ?

 

Le plan Eau présenté par le gouvernement ce jeudi 30 marscontient des annonces qui étaient attendues depuis des années par nos associations : tarification progressive du prix de l’eau potable, objectif de 10 % de baisse des consommations d’eau, libération des budgets des Agences de l’eau etc. A ce titre nous pouvons saluer l’effort écologique affiché.

Mais certains sujets ont été passés sous silence ou restent bien flous notamment sur les montants qui y seront alloués. Nous ne pouvons pas non plus ignorer en parallèle des signaux alarmants : les décisions répétées autorisant des élevages ou des méthaniseurs qui accroissent pollutions et risques, au mépris des décisions de justice qui les annulent, une indifférence de l’Etat envers les agressions des lanceurs d’alertes environnementaux et des actes en contradictions avec les annonces concernant la préservation de l’eau. La demande du ministre de l’Agriculture auprès de l’Anses de revenir sur l’interdiction programmée de l’herbicide S-métolachlore, faite seulement quelques heures après l’annonce de ce vaste plan Eau, n’est pas anodine. Nous attendons donc des actes et des actes cohérents !

 

Ce plan Eau est une confirmation des engagements de l’Etat

Plus que de nouveaux engagements, le « plan eau » rappelle pour l’essentiel des mesures déjà annoncées en 2019 à la suite des Assises de l’eau. Il s’agit donc en réalité plutôt d’une feuille de route du gouvernement et, sur le contenu, la promesse de mettre enfin en œuvre des engagements pour la plupart déjà énoncés lors des séquences de concertation précédente, ou des orientations prises dans les véritables planifications écologiques locales de l’eau que sont les Schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux (Sdage). Sans revenir sur l’ensemble des éléments présentés lors de cette conférence de presse voici quelques éléments d’analyse et d’attention.

 

Face au changement climatique, la sobriété enfin au cœur de nos objectifs ?

En Bretagne, l'alimentation en eau potable dépend pour 3/4 des rivières et des barrages sur rivières. Le changement climatique, c’est d'abord des débits d'été plus faibles, commençant plus tôt, et des crues plus brutales liés à des pluies plus intenses. La question de la sobriété est donc un défi pour une région pour laquelle les démographes annoncent l'arrivée de 400 000 habitants d'ici 2050.

 

La sobriété est définit par le Giec comme « l’ensemble des mesures et de pratiques quotidiennes qui permettent d’éviter l’utilisation d’énergie, de matériaux, de terres et d’eau tout en garantissant le bien-être de tous dans le cadre des limites planétaires ». C’est le levier à mettre en œuvre en priorité pour une transition écologique et solidaire réussie, et pour faire face aux défis environnementaux actuels. Une eau qu'on ne consomme pas est une eau qui reste disponible pour les milieux naturels et les autres usages. L’objectif annoncé d’une baisse de 10 % de la consommation d’eau d’ici 2030 est donc un signal positif et si nous sommes satisfaits que la baisse de consommation reste un objectif central de notre gouvernement, rappelons que lors des Assises de l’eau en 2019 les objectifs alors fixés étaient de -10% en 2024 et de -25 % en 2034.

 

Pour y répondre le gouvernement propose plusieurs solutions intéressantes dont la tarification progressive, l’utilisation domestique des eaux de pluie, l’Ecowatt de l’eau, le matériel hydroéconome…

Concernant la tarification progressive c’est une demande de longue date des associations. Cette annonce est donc une excellente nouvelle. Comme elle relève de la compétence des élus locaux, nous resterons donc attentifs à sa mise en œuvre et demandons qu’il y soit associé un volet social.

 

Les solutions technologiques : priorité à la lutte contre les fuites et aux matériaux hydroéconomes

Les solutions techniques comme la réutilisation d’eaux usées traitées (REUT) ou le développement de technologies hydroéconomes ont déjà fait l’objet d’engagements de l’Etat en 2019 à la suite des assises de l’eau. Elles ont leur place dans le panel de réponses à apporter mais ne suffiront pas. La REUT en particulier représente des coûts importants et doit être étudié avec parcimonie. Cela peut être une bonne idée à l’échelle d’un site industriel mais récupérer l’eau en sortie des stations d’épurations n’est pas sans conséquence.

 

Nicolas Forray adhérent et hydrologue précise qu’ « En Bretagne l’eau potable est prélevé à 75 % dans nos eaux de surface et manque donc dans les rivières, surtout l'été; La station d'épuration en restitue 70% à 80% et contribue largement au débit d'étiage. Evaporer cette eau pour l’irrigation c’est donc assécher nos rivières au moment où elles sont les plus fragiles. ».

 

Gardons l’eau dans nos sols

La Bretagne a des ressources en eaux souterraines limitées. Tout ce qui facilite l'infiltration en profondeur de l'eau est donc crucial : or l’artificialisation importante et les modes de cultures favorisent le ruissellement et un parcours plus rapide de l'eau  jusqu'aux rivières et à la mer. Aujourd’hui notre gestion des sols est une catastrophe agronomique.

 

Faire vivre nos sols est la condition pour y stocker plus d’eau et favoriser l’infiltration vers les nappes. Mais cet objectif recommandé par les agronomes nécessite de revoir en profondeur le modèle agricole productiviste. Les produits phytosanitaires agissent en détruisant « mauvaises » herbes, champignons, insectes… qui font vivre les sols et entretiennent l’humus; Le plan gouvernemental reste absolument muet sur ces points. De la biodiversité en particulier il en est trop peu question : les Solutions Fondées sur la Nature telles que la préservation et la restauration des zones humide, le reméandrage des cours d’eau, la recréation d’un maillage bocager efficient, la gestion de la matière organique des sols, désimperméabilisation… restent des parents pauvres de la planification écologique de l’eau. Redonner la capacité aux sols de mieux retenir, infiltrer et purifier l’eau devrait pourtant être le cœur du sujet et de la stratégie à déployer.

 

Il reste de nombreux « trous dans la raquette » notamment sur la qualité des eaux et la biodiversité qui sont restés absent du discours de notre président. Si nous observons des avancées sur la sobriété pour tous les usages de l’eau, de nombreuses questions restent en suspens quant aux moyens humains et à la mise en œuvre de ces orientations dans les décisions administratives qui seront adossés à ces ambitions.

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