Nitrate, ammoniac, marées vertes : de qui se moque-t-on ?

10 mars 2022
Nitrate, ammoniac, marées vertes : de qui se moque-t-on ?

L’État français qui a échappé de peu à une condamnation de la part de la Cour de Justice de l’Union européenne sur le respect de ses engagements concernant la Directive Nitrates de 1991 ;

L’État qui a été condamné par le juge administratif à mettre en œuvre de toute urgence des mesures réglementaires sur les nitrates en juin 2021 ;

L’État sévèrement critiqué par deux rapports en 2021, l’un de la Cour des comptes, l’autre du Sénat, pour carence dans la gestion du dossier marées vertes, ne semble pas bien mesurer l’importance de ne plus perdre de temps.

 

En effet, si l’on en croit les informations venues d’autres régions de France, la révision des programmes d’actions Nitrates, qui réglementent les pratiques agricoles pour limiter la pollution aux nitrates, sont à l’arrêt ! La Direction Régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt (DRAAF) de Bourgogne Franche-Comté informait dans un courriel adressé aux parties prenantes début février : « le Premier Ministre a décidé de ne pas mettre à la consultation du public le contenu du futur PAN [Programme d'Actions National nitrates]. Cette décision conduit à suspendre les travaux de révision des PAR [Programme d'Actions Régional nitrates] en région , jusqu'à nouvelles consignes gouvernementales. ». Même son de cloche du côté de la DRAAF Auvergne Rhône Alpe dans un courriel du 22 février « Nous vous informons que le cabinet du Premier ministre a décidé de décaler le calendrier de révision du PAN. […] D'après le nouveau calendrier, ces textes, dont le PAN, devraient être publiés en septembre 2022. Le PAR devra être adopté dans un délai de 12 mois à compter de la publication du PAN (pour en assurer la mise en compatibilité) et entrera en vigueur pour la campagne culturale 2023-2024. »

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Une attitude irresponsable pour Eau et rivières de Bretagne

 

Comment doit-on interpréter le silence assourdissant du préfet de la Région Bretagne sur cette question, lui qui n’a toujours pas informé les acteurs bretons de la situation ? Nous savons pourtant tous, que depuis 2015 la situation ne s’améliore plus sur le front des nitrates et reste figée à un tel niveau de pollution, que l’on n’est pas près de voir disparaître les échouages nauséabonds d’algues vertes sur nos plages et vasières bretonnes. Le respect du calendrier européen de révision tous les 4 ans du programme d’action de lutte contre les nitrates est bien le minimum que l’on est en droit d’attendre des pouvoirs publics !

 

Eau et rivières de Bretagne ne comprend pas cette décision de mise à l’arrêt de l’État français qui a pourtant déjà essuyé deux contentieux au niveau européen sur ce dossier et qui donne ainsi à la Bretagne un très mauvais signal.

 

Des programmes pourtant jugés peu ambitieux !

 

Ces Programmes d’actions nationaux et régionaux sont fait pour donner un cadre réglementaire, ils précisent notamment, le calendrier d’épandage pour les lisiers, fumiers et engrais minéraux azotés ainsi que les pratiques agricoles telles que les distances d’épandage à respecter vis-à-vis des tiers ou des cours d’eau, les volumes pour le stockage des effluents, les quantités d’azote maximales à épandre, le respect de la fertilisation équilibrée,... Ils sont révisés tous les 4 ans, par un calendrier défini à l’échelle européenne.

 

Fruit d’une âpre concertation, au cour de laquelle chaque point est discuté entre les Ministères et les multiples interlocuteurs de la profession agricole, ce projet de PAN n°7 avait pourtant vu son ambition globale à la baisse, comme l’a pointé du doigt l’Autorité Environnementale dans son avis du 18 novembre 2021 : « Le projet en reste à des évolutions mineures, peu susceptibles de permettre l’atteinte du bon état des eaux ».

 

Une preuve supplémentaire de la main mise du lobby agricole

Mais dans à ce jeu de la « fabrique du sur-place », nous le savons malheureusement que trop bien, le lobby de l’agriculture industrielle sait se faire entendre au plus haut niveau de l’État. Nous avons pu l’observer et nous dénonçons encore une fois ces pratiques de blocage assortis de menaces qui sont exercées à tous les niveaux par le syndicalisme agricole majoritaire, alors que des espaces démocratiques de concertation et de discussion existent et que les calendriers sont les mêmes pour tous à l’échelle européenne.

 

Les conséquences de ce report

 

Les conséquences principales de ce report seront la perte d’une année culturale pour l’application de nouvelles mesures potentiellement protectrices de l’environnement, mais aussi le non respect de la directive européenne Nitrates de 1991 et en conséquence un risque de contentieux européens rehaussés.

 

Nous déplorons la gestion de ce dossier par les acteurs de l’État : notre association qui participe aux réunions nationales sur le sujet, qui s’est largement impliquée pendant la concertation préalable régionale pour faire entendre la voix de l’environnement, apprend les choses par la bande...

Nous réclamons urgemment des éclaircissements, comme tous les autres acteurs impliqués !

 

Nous dénonçons enfin la faiblesse de l’État, son manque de courage et de vision stratégique dans la gestion du dossier de la pollution des eaux en Bretagne.

 

 

 

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